Et si la Présidence de la République appelait les animalistes à former un gouvernement ?

Idée loufoque, même ridicule ? Pas tant que ça.

Par George Homs

Politologue.

Co-responsable du Sanctuaire la Garie.

Candidat aux élections européennes 2019 et 2024.

Le mouvement animaliste a le potentiel de perturber profondément le paysage politique. Cependant, cela ne se produira pas par la voie de considération éthique, qui est largement minoritaire en France. La nouvelle dynamique politique émergera en traduisant l'esprit animaliste vers une approche cohérente des préoccupations quotidiennes des citoyens. En brisant les clivages entre la gauche, le centre et la droite, et en répondant aux aspirations des citoyens avec des idées novatrices et pragmatiques, une nouvelle majorité politique pourrait émerger. Une majorité qui affirme que la cause animale et la cause humaine sont indissociables.

Le mouvement animaliste doit intensifier sa démarche et accroître son influence. En prenant une place prépondérante dans le paysage politique et médiatique, il doit stopper la trajectoire politique actuelle qui conduit inévitablement à l'effondrement de nos systèmes agroalimentaires, à la mise en danger de notre système de santé, et à l'épuisement de nos ressources naturelles. Les discussions habituelles sur le pouvoir d'achat, le logement ou la retraite ne sont plus pertinentes lorsque nos besoins fondamentaux sont menacés.

La réussite de la cause animale est indissociable de la satisfaction des aspirations humaines et sociétales. Au mouvement animaliste d’assumer sa responsabilité, et de la concrétiser.

La cause animale est morte (pour le moment)...

Soyons lucides. La question de la protection des animaux est reléguée en marge de l'agenda politique et médiatique. Cette situation s'explique aisément. Les partis politiques traditionnels sont réticents à admettre les lacunes fondamentales de leurs positions qui se révèlent être des échecs. Quant à nos concitoyens, bien que la cause animale puisse les toucher, leur sensibilité s'efface rapidement face à leurs préoccupations personnelles.

Et puis il y a l'actualité politique. En janvier 2025, un nouveau président prendra ses fonctions aux États-Unis, ce qui entraînera des perturbations sur la scène internationale et des répercussions économiques et géopolitiques importantes. En France, la situation est marquée par un spectacle alimenté par des manœuvres électorales cyniques et destructrices. La confiance des citoyens envers les institutions publiques s'amenuise rapidement, laissant place à un climat d'incertitude.

La plupart des politiques et des citoyens considèrent que les défenseurs de la cause animale sont déconnectés de la réalité. De plus, ils pensent que les animalistes sont moralisateurs et cherchent à les priver des 'traditions' et des petits plaisirs de la vie.

Et pourtant, l’esprit animaliste peut tout basculer…

La générosité totale et désintéressée envers le monde animal caractérise l'esprit animaliste. Les défenseurs des animaux ne recherchent aucun bénéfice personnel dans leur lutte pour la dignité animale, s'opposant à l'exploitation et à la souffrance de plus d'un milliard d'animaux qui perdent la vie chaque année en France.

Et au fond, intrinsèque à l'esprit animaliste, c'est sa capacité à ressentir la même empathie pour les intérêts de 68 millions d'êtres humains.

L'esprit animaliste peut introduire une nouvelle culture politique qui favorise l'écoute, le dialogue, le pragmatisme et la recherche de consensus, des valeurs malheureusement absentes dans le monde politique d'aujourd'hui.

Il ne faut pas se méprendre, cette aspiration n'est ni simpliste ni naïve. Elle traduit le désir profond des Français qui, contrairement à leurs politiciens, parviennent toujours à communiquer et à se comprendre lorsqu'ils le décident.

C'est parce que le monde politique ne répond plus aux attentes des citoyens que la moitié d'entre eux ne votent pas. Et parmi ceux qui votent, une autre moitié se tourne vers le populisme par dépit envers les partis traditionnels.

Alors que les Français dialoguent, les politiciens divisent et polarisent pour mieux asseoir leur pouvoir.

Le mouvement animaliste peut se réjouir d'avoir accompli l'ancrage de la cause animale sur la scène politique - par sa capacité de mobilisation et par ses premiers succès électoraux. Il bénéficie d'un socle électoral d'environ un million de votants, constitué de partisans pour qui la cause animale est suffisamment importante pour mériter leur vote.

À partir de cette base, il est maintenant nécessaire de développer et mettre en œuvre une nouvelle approche visant à conduire ce soutien vers une majorité.

Commençons par oublier les clivages entre la gauche, le centre et la droite…

Dans le mouvement animaliste, certains pensent que la cause animale est par définition une lutte 'de gauche'. Cependant, si tel était le cas, nous serions en difficulté car la gauche est bien minoritaire. De plus, les politiques agricoles actuelles et l'industrialisation intensive de l'élevage résultent de l'action de tous les courants politiques, qu'ils soient de gauche, de droite ou du centre.

En réalité, il serait destructeur de confiner la cause animale à un seul courant politique. Il est essentiel de dépasser les divisions et les idées rétrogrades et bloquantes telles que "la gauche", "le centre", "la droite"... Les anciennes idéologies politiques ne proposent rien de novateur et ne sont pas en accord avec les réalités sociales ni les préoccupations des Français.

A nous de construire une proposition politique qui rassemble…

La cause animale n'est pas distincte des autres enjeux sociaux et des préoccupations des citoyens, elle est étroitement liée à ces derniers.

En ce qui concerne les relations directes… La cause animale est fondamentalement impactée par nos choix alimentaires, et par conséquent pour notre modèle agricole. L'alimentation et la nutrition jouent un rôle essentiel dans le maintien de notre santé. De plus, l'agriculture a un impact significatif sur l'environnement, ce qui a des répercussions sur la santé publique, nos ressources naturelles et les phénomènes climatiques.

Cependant, pour aller plus loin... Afin de mettre un terme à une politique agricole moribonde, il est essentiel de satisfaire d'abord les attentes des agriculteurs. Alors que la transition alimentaire profitera aux êtres humains et aux animaux, il est également crucial de libérer les agriculteurs de la pauvreté écrasante et de l'endettement oppressant. Il est impératif de traiter également les problématiques des échanges agroalimentaires, souvent inéquitables.

La cause des animaux est intrinsèquement liée à celle des êtres humains. Elle ne peut se restreindre à leur bien-être. Par conséquent, le mouvement animaliste doit aborder toutes les problématiques sociétales majeures : l'action sociale, la santé publique, l'économie, la fiscalité, le commerce international, la géopolitique et le bon fonctionnement de notre système démocratique.

Plutôt que de recourir à des programmes complexes visant à résoudre tous les problèmes possibles, il est essentiel de simplifier la vie publique, de la rendre plus saine et de se focaliser sur les valeurs fondamentales qui doivent animer le renouveau politique.

En étendant l'approche politique du mouvement animaliste, est-ce qu'on risque d'y perdre son âme?

Pas vraiment puisque, en affirmant son engagement pour la cause humaine, on consolide également la place de la cause animale dans le discours public.

Il est important de se rappeler que les militants du mouvement animaliste ont des opinions variées avant de s'engager. Ce qui est remarquable, c'est qu'ils se rassemblent malgré leurs différences pour défendre une cause qu'ils considèrent comme noble et juste.

L'esprit animaliste consiste à être capable de transcender les divergences et de rompre avec tous les préceptes du monde politique traditionnel. L'engagement en faveur de la cause animale restera toujours aussi fort, car il constitue le cœur même de ce nouveau mouvement politique.

En dépassant les clivages habituels, nous parviendrons à convaincre la majorité des Français que leurs intérêts individuels et communs sont étroitement liés à la progression de l'esprit animaliste en politique.